Du 5 au 26 Mars 2019, j’ai été amené à réaliser une résidence au Brésil entre São Paulo, Penedo, Rio De Janeiro, Piracaïa,… Cette résidence, structurée par la Compagnie Hirundo Rustica, a été réalisée grâce à l’aide de la Région Bretagne et de l’Institut Français. Je suis parti pour y donner des concerts, enregistrer des compositions et ramener de la matière vidéo pour faire la promotion de 2 formations et d’un concert solo….
5 Mars
Aujourd’hui, c’est le départ. Je m’en vais retrouver le Brésil avec le vieux compagnon de route Jacques-Yves Lafontaine.
Je sors d’une dense période de travail (sortie de l’album de Kerlaveo, Oficina, Zingaro,…) et nous avons passé une journée magnifique à la Tête des Trains de Tousson en Seine et Marne, avec Ravichandra Kulur et Camilo Menjura.
Nous avons retrouvé l’ami Pierrot dimanche soir après la dernière de Zingaro à Aubervilliers et avons passé la journée à travailler.
Au programme vidéo de 2 morceaux de Magic Flutes, une chanson de Camilo, une rencontre avec les enfants et habitants de Tousson.
Retour à Zingaro, je vide mon sac, remplis ma valise, prépare mes 3 semaines et mon déménagement vers la Bretagne dès mon retour à Paris.
Nous voilà partis, un voyage sans encombre pour de nouvelles aventures avec mon grand ami Vitor Lopes.
Il nous attend à l’aéroport et nous arrivons en plein orage tropical à São Paulo. Impressionnant!!!!
Je suis immensément heureux de retrouver Vitor et nous avons plein de choses à nous dire alors que j’étais ici il y a 5 mois.
La situation politique a énormément changé et le pouvoir en place prend des décisions extrêmement choquantes et inquiétantes.
Vitor nous explique l’instauration de l’hymne national filmé tous les matins dans toutes les écoles du pays, le retour de la couleur bleu pour les garçons et rose pour les filles, la nomination d’un énorme propriétaire terrien pour gérer la division des terres agricoles du pays…
Il reste la musique, la famille, les amis,… Vitor de donne beaucoup de nouvelles et me demande des nouvelles de Bretagne.
Nous allons avoir beaucoup d’activités ces jours ci.
Arrivée à la maison de Butãnta, je retourne Camila et Madhu, Nous sommes tous très heureux des retrouvailles autour d’un savoureux ceviche à la mangue préparée par Camila.
Elle vient de faire paraître un nouveau recueil de Haïkus dont l’édition est splendide.
Je ne trainerai pas, je suis bien fatigué.
Mercredi 6 mars
Bonne nuit, je me prépare le petit déjeuner avec une galette de Tapioca et retrouve les petites habitudes.
Les fruits sont excellents et Jacques-Yves a la sourire!!
Retour à la réalité,…ce matin nous avons appris l’autorisation accordée aux entreprises pour exploiter des minerais au coeur de l’Amazonie,… hallucinant et apocalyptique.
Nous allons répéter vers 11 h et retrouver une partie des musiciens qui vont participer à l’enregistrement d’ »Oficina » la semaine prochaine.
Nous partons dans le quartier pour la promenade de « Meia Lua » le chien de la maison. C’est toujours l’occasion de discuter, d’apprendre auprès de Vitor. Il nous montre les arbres, manguiers, jabuticaba, patinage, cafè, jasmin,.. il y a tant de couleurs et de belles odeur dans cette environnement tropical où la nature se rappelle à nous en permanence.
Un petit rendez-vous Skype avec Carlos Malta à Rio De Janeiro pour voir les prochains rendez-vous et en route vers la première répétition.
Nous allons chez Gabriel Levy, l’accordéoniste/pianiste de Kerlaveo, il réside dans le quartier Sumaré.
Nous allons travailler à 4 avec Tiago le bassiste remplaçant de Rui parti en tournée. Nous allons jouer, Jacques-Yves fera des images et l’après-midi va passer bien vite.
Nous rentrons, discutons, nous reconnectons au monde et Camila nous concocte ce soir une magnifique préparation de poulet avec de la purée de tomate, du brocolis, de la purée de polenta et du taioba, magnifique!! On va se régaler!
Jeudi 7 Mars
Réveillé vers 6h du matin, je vais tranquillement me recaller je crois.
Je cuisine des petites galettes de sarrasin au petit déjeuner, ce qui a l’air de réjouir tout le monde.
Ce matin, on va faire du bureau et préparer tranquillement les séances de studio de la semaine prochaine.
Il ne faudra pas gâcher le temps, le programme est ambitieux.
Nous déjeunons de bonne heure et nous rendons chez Pedro Ito, le batteur de Kerlaveo pour une répétition avec tous les musiciens.
La répétition se passera bien.
Les musiciens sont magnifiques et ne sont pas longs à comprendre l’essence des compostions, les mises en place, les grosses,… ça joue merveilleusement.
Pour une première connexion au répertoire d’Oficina, c’est énorme!!
Je suis très heureux.
L’après-midi passe très vite, nous allons également travailler le répertoire de Kerlavéo car il y a 2 concerts ce week-end.
L’ambiance est bonne, Tiago, le bassiste suppléant s’intègre avec une fluidité splendide.
Il est tout en sourire, cet ensemble musical est composé de gens très différents et bien complémentaires, tout le monde a l’air être heureux d’être ici.
Jacques-Yves découvre tout cela et est tout sourire. Il filme, travaille tout le temps,… nous aurons de la belle matière pour travailler autour du groupe et du disque.
Camila nous rejoint en fin de répétition et nous partons dans le quartier de l’Avenue Paulista, le centre financier de la ville.
Nous sommes là davantage dans la grande mégapole sud américaine, de gros buildings dans une grosse avenue.
Ce soir nous allons au Blue Note écouter Carlos Malta en trio.
Une petite pause pour le premier restaurant au kilo de Jacques-Yves.
Tu te sers comme tu le sens dans un gros buffet, tu pèses ton assiette et tu manges.
Puis, nous nous rendons au Blue Note, le club est classieux.
Je vais saluer Carlos en backstage, il est très heureux de me voir et nous nous réjouissons du temps que nous passerons ensemble bientôt.
Danielle, sa compagne est là ce soir et je vais faire sa connaissance.
Le concert démarre, un trio de 2 percussions et une flûte.
Les percussions sont la grande classe, Marco Suzanno et Robertinho Silva.
La musique est très improvisée et Carlos mène le show comme il sait le faire.
Je bois du petit lait, le trio envoie du son magnifique.
Chacun est à sa place, juste et magnifique.
Nous discutons un peu avec Carlos et Danielle avant de revenir vers Butantã.
Je ne trainerai pas car je suis très fatigué.
Vendredi 8 mars.
J’ai bien dormi, ce matin, quelques rendez-vous skype et paperasse diverses avant de partir déjeuner.
Nous allons dans un restaurant Péruvien manger des céviches. préparation de poisson cru, mariné dans le citron.Nous allons avoir a plusieurs recettes avec de la patate douce. C’est super bon!!! Epicé comme il faut, des saveurs que nous redécouvrons.
Retour à la maison puis courses et petite répétition et petite vidéo pour annoncer le concert de Kerlaveo dimanche prochain.
Puis, je retrouve Jacques-Yves et nous allons préparer le dîner ensemble autour d’un curry de légumes.
Belle soirée en être amis. Demain premier concert…..
Samedi 9 Mars
Nous nous préparons à partir à Embu, aujourd’hui, premier concert avec Kerlaveo.
La matinée se passe tranquillement, petite marche dans l quartier avec Jacques-Yves pour découvrir un peu plus la vie autour de nous,
Retour chez Vitor pour une petite répétition et quelques détails de musique à affiner.
Pause déjeuner et en route vers Embu.
Le concert a lieu chez des amis de Vitor, Vivi et Flavio.
Nous arrivons dans un condominio, entendez résidence privée.
Ce sont des endroits où réside une population aisée.
Il n’y a que des grosses maisons avec des clotures au sein d’une résidence clôturée. La route serpente à flan de colline avec des montées parfois raides. Vitor connait bien visiblement.
Nous déchargeons le matériel et faisons connaissance de nos hôtes d’une après-midi.
Ils sont très sympa et heureux d’accueillir ce concert.
C’est inhabituel ce genre de concert à domicile ici.
Vitor a importé cette pratique de ses nombreux voyages en Bretagne où la pratique est courante et ancienne sur toute la région.
Nous sommes encore à São Paulo mais en pleine nature.
Les arbres sont magnifiques il y a des fleurs de toutes les couleurs, une richesse végétale magnifique. Je m’y sens bien. Cela me rend heureux de retrouver pour quelques temps la nature, les arbres, entendre les chants d’oiseaux, sentir une brise douce,…
Une rumeur lointaine nous prévient de l’arrivée d’un orage bientôt
Les musiciens arrivent s’installent, nous faisons une petite répétition, Jacques-Yves a apporté du matériel avec lui et va s’occuper du son du concert .. ainsi que de la vidéo .
Les invités et amis arrivent, nous allons pouvoir démarrer le concert.
Je suis un peu fébrile au début, très concentré sur cette musique fine, subtile avec beaucoup de petits arrangements que j’ai peur d’oublier.
Puis, la connexion avec Vitor opère et nous allons dialoguer tous ensemble.
Les yeux du public attestent de leur implication avec nous.
L’écoute est superbe.
Le concert sera généreux, varié, inspiré, inspirant, joyeux, puissant,…
Les échanges à l’issue du concert seront très intéressants avec le public.
Nous allons parler musique, Bretagne mais aussi Brésil, Venezuela, gilets jaunes, je sens que l’information qu’ils reçoivent au Brésil sur la France passe par les grands médias et leurs habituelles créations de clichés, de peur, de jugements sans finesses,… donc, je prends le temps de la précision et de prudence.
Nous parlerons également de mon travail avec Zingaro qui intrigue beaucoup. des chevaux sans cavaliers,….
Dimanche 10 Mars
Nous sommes levés de bonne heure ce matin car le concert est à 11h.
Après le petit déjeuner nous partons vers le Museu da Casa Brasileira.
Nous sommes reçus à bras ouverts par Carmelita qui est la coordinatrice musique du lieu.
Cette ancienne grande batisse aristocrate a été offert à la ville de São Paulo par un ancien maire, homme d’affaire très riche et c’en est devenu un musée dédié à l’architecture et à la construction au Brésil.
Il y a différentes petites salles d’exposition avec des volets liés à l’architecture contemporaine et d’autres à la richesse des ressources naturelles permettant la construction au Brésil.
Les musiciens de Kerlaveo arrivent progressivement et le temps que tout le monde s’installe pour la balance, je vais flâner dans le parc, dans le musée.
Les arbres sont toujours aussi magnifiques. Il fait très chaud ce matin.
Nous allons jouer dans une sorte d’espace couvert par une grande bâche et nous aurons très chaud.
Le son ne va pas être simple non plus.
Nous faisons nos balances, le responsable du son connaît son espace et son matériel et c’est plutôt agréable.
Jacques-Yves installe sa caméra et filmera le concert.
Le temps passe très vite comme à chaque fois et nous terminons les balances, le temps de boire un cafe et le public est déjà là.
Il faut y aller.
Le concert va très bien se passer. Je reconnais beaucoup d’amis dans le public.
Je vais me lâcher aujourd’hui. C’est le moment.
Je me branche sur Vitor nous jouons face à face… les yeux dans les yeux… le public venu nombreux répond à la proposition avec enthousiasme et moult décibels.
Nous allons tous nous lâcher aujourd’hui, il y aura des moments magiques, un plinn tropical avec 100 personnes main dans la main pour une chaîne émouvante.
J’ai composé des morceaux que nous jouons maintenant et qui sont des rêveries brésiliennes, … à peine lancé mon Baião d’inspiration nordestine, 3 femmes se mettent à danser.
Je ne my attendais pas et cela me touche beaucoup.
Vitor le voit et sourit jusqu’aux oreilles.
Nous aurons le droit à une standing ovation, un rappel très sonore et beaucoup d’échanges avec le public après le concert.
Je retrouve les amis musiciens Marcus Simon (le batteur qui avait joué dans Kerlaveo en septembre), Daniel Murray ( le guitariste qui enregistre demain pour Oficina), Benjamin Taubkin (un magnifique pianiste de São Paulo),… mais il y a tant d’amis de Vitor et de Camila que je connais, la famille, le frère de Vitor, les soeurs de Camila,… nous allons vendre des disques, signer des autographes, discuter avec des gens, c’est le Brésil, je rencontre des gens d’origine mexicaine, kurdes, moldaves, …
Un bien beau moment.
Nous irons ensuite déjeuner dans le restaurant familial proche de chez Vitor, nous somme de retour dans cette nature tropicale, des arbres magnifiques, des petits singes en quête de fruits passent près de nous.
Un bon repas en famille avant de repartir dans le centre de São Paulo.
C’est la fin du carnaval et il reste encore quelques irréductibles fêtards qui sont de sortie.
Vitor, Camila et Madhu restent à la maison, fatigués.
Je pars avec Jacques-Yves en métro.
Nous arrivons dans le centre de São Paulo,… l’impression d’entrer dans un film… quasiment tout le monde est maquillé, costumé.
Il y a quelques trios électricos, gros bus chargés de son qui envoient des décibels monstrueux à un cortège éclectique, hétérogène venu pour danser, boire, rencontrer, oublier, rire,… l’espace suspendu d’un moment étrange, irréel..
Jacques-Yves et moi regardons tout sourires, ces cortèges aux couleurs bigarrées.
Nous nous promènerons pendant une heure dans ce quartier faite des gratte ciels pour la plupart en mauvais état,… une ambiance très étrange… une musique peu intéressante qui nous fera écourter notre découverte pour rentrer à Butanta.
Une soirée tranquille entre amis. Ce soir notre repas sera quasiment exclusivement composé de fruits, raisins, mangues, mamão, carambola, atemoya, …nous allons nous régaler. Nous faisons une courte réunion d’organisation à propos de la semaine prochaine. Nous allons au studio demain matin et commençons l’enregistrement du disque d’Oficina. Le planning est serré et le chantier ambitieux, il va falloir être efficace.
Je termine cette partie du journal et au lit.
Lundi 11 Mars
Nous voilà parti au studio Arsis.
Après 40 mn de route nous arrivons au studio et faisons la connaissance de Junior le propriétaire.
Le studio est grand et confortable, nous allons travailler dans de bonnes conditions.
Le lieu appartenait à une compagnie de téléphone et Julio s’y est installé il y a 2 ans et demi.
Le dernier album d’Hermeto Pascoal a été enregistré ici.
Les 2 ingénieurs du son préparent le travail pendant que Vitor part faire quelques courses.
Je prépare la session d’enregistrement de mon côté.
Vitor est admirablement précieux, disponible, généreux, solide,… je n’aurai jamais pu faire ce parcours et ce chemin sans lui.
Je me trouve bien chanceux.
Je retrouve Jacques-Yves et Junior, Jaco a le visage illuminé, il y des super micros partout! Il me dit tout sourire « c’est Noël aujourd’hui! ». Ils semblent bien s’entendre ces deux là.
Pedro Ito arrive installer la batterie.
Nous allons faire le son de Pedro et enregistrer un témoin de Maracatu pour permettre aux autre musiciens de poser des instruments sur une petite structure.
Puis arrive Daniel Murray, le magnifique guitariste rencontré il y a 20 ans entre Lannion et Locquémeau, je l’invite à faire 2 interventions sur l’album, le premier morceau est une composition pour le fils de Vitor.
Nous allons faire 2 prises et garder la meilleure, le morceau est très calme très aéré, il contrastera avec les morceaux plus denses et dansants de l’album.
Le son est super, nous partons bien.
Ensuite nous jouons un bout de Braga un autre morceau que nous terminerons demain avec Kerlaveo.
Nous faisons 3 prises et c’est bon, Daniel nous propose 2/3 introductions, nous enregistrons tout et gardons tout précieusement.
Je profite de la présence de Camila, la femme de Vitor pour l’enregistrer tandis qu’elle récite 3 Haïkus écris par elle que j’utilise dans le spectacle Oficina.
Arrive ensuite Julio César, magnifique percussionniste de l’école de samba VaiVai.
Il va nous faire un festival de percussions en 2 heures. 2 morceaux qui groovent… mais qui groovent….
Voilà c’est parti! Retour à Butantã fatigués mais contents, cette première journée a été très riche et bien remplie.
Mardi 12 Mars
Réveil dans l’actualité, nous apprenons l’arrestation de 2 policiers soupçonnés d’avoir assassiné Marielle Franco l’an dernier.
Cette conseillère municipale très impliquée dans la vie des quartiers aurait été tuée par des policiers apportent à une milice.
https://www.francetvinfo.fr/monde/bresil/bresil-deux-policiers-arretes-pour-l-assassinat-de-l-elue-noire-marielle-franco_3229665.html
Vitor m’explique comment ce système de Ripoux s’est développé, comment il s’approprie illégalement des terrains de l’état et qu’il organise la spéculation dessus.
C’est peut-être ceci que Marielle Franco était sur le point de dévoiler.
Nous partons au studio en métro ce matin.
Nous avons 3 changements et arrivons au sud de São Paulo en 45mn. Carlinhos et Tiago sont déjà là.
Nous allons installer faire le son des deux, puis arrive Gabriel et dès qu’il a fini ses réglages Pedro est là… donc on y va.
Nous allons enregistrer jusqu’à 16h30 avec une équipe super motivée qui veut graver de la belle musique, c’est hyper stimulant…
Nous allons enregistrer Braga, Frevo, et Laranjeiras/Serafim… ça groove superbement et le son est magnifique ici… quelle équipe de musiciens fantastiques pour cet album!!!
Tout se passe sérieusement et très tranquillement.
Professionnels habités et magnifiques!
Daniel Murray arrive, nous venons de terminer le morceau hommage à Toni Braga sur lequel il joue.
Nous allons en profiter pour faire deux prises d’une proposition d’improvisation basée sur une gwerz du Trégor « Ar Vestrez Klanv », Kerlaveo et Daniel Murray …. magnifiques, Jacques-Yves est conquis…
Nous reprenons ensuite avec Daniel Murray après une séance photo pour l’album et les réseaux sociaux.
Daniel mettra rapidement en boite ses parties de guitare pour le morceau Braga.
Tout le monde quitte le studio avec le sourire.
J’espère que l’on arrive à se revoir avant mon retour en Bretagne.
Demain, je serai seul en studio avec Jacques-Yves et Junior.
Nous rentrons avec Viitor et Jaco en métro, en profitons pour faire quelques prises de sons et vidéos.
Retour à Butantã, Camila nous a préparé un bol asiatique succulent… c’était une grosse journée, ce n’était pas gagné d’avance mis nous avons fait un super travail aujourd’hui… Nous dormirons bien…
Mercredi 13 Mars
Retour au studio avec Jacques-Yves, nous laissons Vitor à la maison, il a des choses à faire.
Nous repartons en métro et déambulons dans les méandres souterrains tranquillement.
Junior nous attend avec le sourire.
Ce matin, j’ai pas mal de travail avec le Logelloop, le logiciel que j’utilise durant le spectacle d’Oficina.
Nous allons nous synchroniser avec une des cartes son du studio.
Tout est en réseau, je n’y comprends pas grand chose mais je vois que Jacques-Yves est épaté et heureux de la méthode de travail ici.
Des super micros, des super câbles, des super préamplis, tout en réseau avec un patch hyper complexe pour permettre de brancher tout ce que ‘on veut à tout moment.
Je télécharge les drivers de la carte et tout se synchronise avec une rallonge USB.
Le patch de mon câblage passe par la connexion internet,… on y va.
Je vais faire une prise de son des cloches que m’a donné Anselme Alvès, préparer Sete Santos à accueillir Carlos Malta et Augusto Mattoso la semaine prochaine, ouvrir le Granulaterre du logiciel, Junior est très intéressé par le Logelloop, il voit bien que c’est plus complexe qu’un simple looper.
Nous allons ensuite reprendre la Samba de l’Hirondelle que Julio Cesar m’a fait enregistrer avant de faire une pause déjeuner.
Junior s’occupe du repas avec du poulet, du riz, des feijão (haricots noirs), du farofa (condiment à base de manioc en poudre succulent), des frites de manioc, de la salade … le tout arrosé d’un merveilleux jus de mangue.
Tout va bien, l’ambiance est bonne, le travail avance.
Il est 16h30, Vitor nous retrouve et il arrive exactement au bon moment.
Je ne sais pas comment organiser les percussions de Julio.
Vitor va précieusement travailler avec Junior sur un arrangement des repique, repique de aneis, alfaïa, chéquéré, agogo, pandeiros sur lesquels la flûte se pose.
J’ai vraiment envie de laisser les choses s’organiser sur ce disque.
J’ai beaucoup travaillé seul sur le spectacle « Oficina » avant que l’ami Laurent Petereau ne vienne s’impliquer avec son savoir faire et les portes que cela a ouvert.
Mais, je travaille trop au contact de gens voulant tout contrôler, tout maitriser en ce moment pour avoir envie de fonctionner sur ce mode.
Je coordonne, initie, ouvre des portes et quand les gens s’en emparent c’est super.
Il en va ainsi de Vitor qui travaille sur ce morceau imprévu, née d’un désir de Julio de donner ce qu’il maîtrisait le mieux, la Samba.
J’ai également laissé tout au long des répétitions et de l’enregistrement Carlinhos, Gabriel, Daniel, Pedro, Tiago, Jacques-Yves proposer des idées, des pistes,… et généralement ça tombe juste.
Exactement où il faut.
A l’image de Camila qui propose un nouveau poème non prévu sur un des morceaux.
Nous allons l’enregistrer ce soir au retour du studio et ce sera une super idée qui tombe exactement où il faut.
Moi qui adore accueillir l’inattendu, je suis servi!!
Nous terminons la journée, les exports de fichiers entre le studio et Jacques-Yves se passent avec fluidité… tout va bien.
Déjà fini…. nous serions bien restés travailler davantage dans ce lieu incroyable … mais il faut y aller.
Rio nous attend.
Sur la route du retour Vitor nous annonce qu’il y a eu une tuerie dans une école à 50mn de São Paulo, 2 jeunes sont entrés dans leur ancienne école et ont tué des éducateurs, des professeurs et des élèves,… un carnage.
Vitor est consterné,… évidement il y a déjà des gens ici pour dire qu’il faudrait armer tout le monde pour être tranquille… abominable.
Nous rentrons chez Vitor rapidement pour dîner et faire la prise de son de Camila avant de repartir au Jazz No Fundos, un club où joue ce soir le pianiste Benjamin Taubkin avec Oleg Fateev et Simone Sou.
Ce sera un super soirée, la musique est magnifique. 2 sets, le premier tourne autour des compositions de la batteuse, les sons sont fins et beaux.
Le deuxième est centré sur les compositions d’Oleg qui a beaucoup écrit pour le théâtre et le cinéma, c’est dans cette partie qu’intervient Benjamin.
La musique sera belle et variée, JacquesYves est impressionné par le toucher de piano de Benjamin et sa musicalité.
Ce soir, c’est Jacques-Yves qui paie la tournée.
Je commande du vin rouge, …. en fait, je n’ai pas fait attention et ici ils vendent le verre à la bouteille!!
Trop tard pour changer de commande, la bouteille est ouverte….je vais participer à la tournée parce qu’ici, le vin coûte bien cher.
Je me souviendrais de cette anecdote…
Nous rentrons préparer nos affaires, demain nous quittons São Paulo.
Jeudi 14 Mars
Levés de bonne heure pour nous préparer au départ.
Nous disons au revoir à Madhu et Camila, Jacques-Yves ne passera pas par la case Butantã au retour.
Vitor voulait partir de bonne heure à cause des embouteillages, bien lui en a pris. Sa jauge d’essence est cassée et nous allons tomber en panne d’essence en plein traffic…. comme nous sommes en ville, il y a des stations service partout et nous repartirons rapidement vers la gare routière.
Le trajet se passe bien.
Nous sommes épuisés,… nous allons faire des micro siestes et profiter de paysages magnifiques, tout en relief,… de la verdure tropicale splendide.
Nous traversons un paysage de plaines, montagnes, collines, chatoyant, les arbres sont magnifiques, ça et là des fourmilières géantes vient se poser sur des tapis de verdure, présageantes d’une vie souterraine puissante et multiple.
Nous récupérons des forces et discutons un peu de cette nouvelle expérience avec Jacques-Yves, il a l’air heureux ici et ça me remplit de joie.
Le chantier est vaste, Oficina, Kerlaveo, Sopro Da Terra, du son, de l’image, un disque, des vidéos, des concerts, des rencontres, de la création,…. nous ne nous posons guère!
Nous arrivons à Resende où nous attend Guga Murray.
C’est un vieil ami rencontré en 1999, il y a 20 ans déjà. Guga était un des piliers de l’aventure « Terra Musical » avec Kej et les autres amis.
Nous avons eu une relation très forte durant toutes ces années de musique partagée.
Le temps a fait que nous nous sommes un peu perdus de vue. Guga s’est investi ici depuis 10 ans dans la création d’une école de musique qui marche super bien.
Nous allons déjeuner dans un restaurant au kilo de Resende.
Un bon temps d’échange sur la famille, les amis, … Guga a très bien avancé sur son école de musique. dans cette école, tu es obligé de prendre une autre option artistique quand tu t’inscris.
Par exemple, si tu suis des cours de guitare, tu dois également suivre des cours de danse ou de peinture ou de poésie,… c’est une très belle idée pleine d’ouverture.
Inévitablement nous aborderons la question de la situation politique au Brésil.
Là aussi, Guga est catastrophé, il considère que nous sommes revenus à la même situation que dans les années 30 en Europe.
Pire, c’est la guerre nous dit-il.
Nous allons rendre une visite à l’école de musique.
Elle a déménagé depuis mon passage en 2013, c’est une super belle maison bien aménagée.
Guga y est locataire. Nous retrouvons Patricia, son épouse et buvons un café avec eux.
L’énergie est bien douce et nous sommes heureux de nous retrouver.
Il est 15h, nous devons partir vers Penedo.
Guga nous amène et nous explique que la ville a été fondée au 19ème par une colonie Finlandaise.
Nous arrivons donc dans la petite Finlande, endroit insolite, très touristique avec plein de spécialités scandinaves. Dont les bières locales evel just.
Nous passons un petit cours d’eau nous voilà à pequeña Suecia, la petite Suède, trop drôle.
Une petite douche, une petite sieste et ce sont les retrouvailles avec Carlos Malta.
Il est venu avec Danielle sa compagne dont je vais faire la connaissance.
Dans un premier temps, nous allons travailler et voir si nos instruments sont toujours connectés.
Nous allons avoir 2 heures de musiques et de plaisir.
Nos instruments se parlent, dialoguent sur des allers-retours entre Bretagne et Brésil, entre Trégor et Sertão.
Dîner tranquille et au lit.
Vendredi 15 Mars
J’allume mon téléphone ce matin et j’apprends que ma mère a été admise au urgences pendant la nuit pour une nouvelle alerte cardiaque.
Son état s’est stabilisé mais nous avons tous peur pour elle,… et je suis si loin.
Je communique avec mon père, ma soeur et ma compagne avant de me rebrancher sur le local ici.
J’allume une bougie près d’une orchidée, sa fleur favorite, qui nous attendait à notre arrivée ici.
Jacques-Yves continue son travail sur les morceaux de sa chambre, j’entends le son et me dit que nous avançons bien.
Carlos m’explique les détails de la tuerie de São Paulo de la semaine passée. Les 2 jeunes ayant commis le massacre étaient fous de jeux vidéo. La tuerie a été scénarisée comme un jeu vidéo avec les vêtements, les armes, les cibles,…. Un cauchemard… quand ils ont vu que la police les encerclait le plus jeune a abattu son aîné avant de retourner son arme contre lui.
La police a retrouvé une lettre chez l’un des meurtriers expliquant tout cela avec de nombreux détails et une écriture extrêmement troublante…. quelle horreur!
Après un petit point avec Carlos et Jacques-Yves, nous partons marcher une heure dans Penedo.
C’est une ambiance curieuse, la petite Finlande avec ses spécialités du nord…. c’est une petite ville touristique ici, il y a beaucoup de boutiques, beaucoup de toc et un peu d’artisanat raffiné quand même, particulièrement au niveau textile.
Nous faisons un pause jus de fruit et je prends un jus d’ananas-menthe, pendant que Jacques-Yves déguste un pastèque-gingembre.
Nous retournons à l’hôtel.
Pas de nouvelles de l’hôpital de Paimpol, je me dis que la situation est stable…. et j’attends….
Nous allons déjeuner ensemble avec Bernardo qui vient d’arriver de Rio.
Bernardo est un percussionniste magnifique que j’ai rencontré avec Carlos en 2013.
J’ai quelques nouvelles de Bretagne et l’état de ma mère s’est stabilisé, je pense beaucoup à elle aujourd’hui, à mon père qui doit être très très inquiet, à ma soeur, toujours disponible depuis quelques temps pour aider, accompagner,…
Je vais passer une partie de l’après-midi à travailler sur le Logelloop pour le concert.
J’ai fait pas mal de changements pour l’enregistrement et je dois vérifier que tout fonctionne pour le concert.
Je retrouve Bernardo et Carlos au Jazz Village vers 17h30, nous allons faire une balance avec le jeune Tiago et une brève répétition.
Le système son est rudimentaire et basique mais grâce à l’aide de Jacques-Yves, nous allons réussir à tout gérer, mes boucles, les percussions et les liens de Carlos.
Retour à la chambre pour une petite préparation, j’ai des nouvelles apaisantes de Bretagne.
Je me sens un peu soulagé.
En route vers le concert. Il y a un peu de monde, Guga est déjà là.
Nous allons jouer pour ma mère ce soir, pour la mère de Carlos également, finalement nous décidons de dédier ce concert aux mamans….
Nous démarrons avec les cloches d’Anselme Alvès que j’utilise pour Oficina.
Carlos n’avait pas la place pour apporter les flûtes des indiens Japurutu avec lesquelles nous ouvrons habituellement les concerts.
Nous allons donc démarrer sur cette matière rustique acoustique, qui devient progressivement électronique avec l’aide du Logelloop et des pédales de Carlos.
Le concert va passer très très vite, nous sommes dans l’écoute, dans l’échange, la musique est généreuse, habitée. Les improvisations inspirées,…. Tout fonctionne à l’énergie et à l’amour…. nous utilisons des flûtes aux tempéraments différents mais la musique fonctionne, c’est radical et étonnant….
Je croise le regard de Guga, je connais ses oreilles de magnifique guitariste et compositeur, il est tout sourire.
Nous avons convenu de choses lors de la répétition d’hier et nous allons jouer autre chose!! j’adore!
Tout est sur l’écoute et la réactivité!!
Nous sentons que la musique doit se sentir, se partager, l’écoute est magnifique!
Les morceaux vont s’enchaîner, les laridés dialoguent avec les Xaxado, les improvisations se suivent, à chaque fois différentes,…
Le public est avec nous, on sent l’écoute, l’implication, … le concert sera très beau, le public en redemande. Carlos a le sourire jusqu’aux oreilles!!
A la fin du concert, Guga viendra me voir me disant qu’il avait pleuré et que ça ne lui était pas arrivé depuis 10 ans de pleurer avec de la musique. Je suis très ému.
Nous restons dîner et discuter avec les amis avant d’aller dormir.
Dernières nouvelles de l’Armor, la maman va mieux et récupère. Grosse frayeur…
Samedi 16 Mars
Ce matin petit déjeuner et écoute des morceaux que je propose à Carlos et Bernardo, ils ont l’air heureux de la proposition et pensent que la séance de studio de Rio de Janeiro va être très plaisante.
Nous pensons réduire le temps de studio pour que Jacques-Yves aille chez Bernardo enregistrer des percussions mercredi.
Bernardo connait sa pièce, il a tous ses instruments et préfère essayer des choses à la maison.
On va partir sur cette option.
Nous ne verrons pas Guga comme prévu ce midi car Patricia est souffrante et il doit s’occuper d’elle.
Nous allons déjeuner et faire quelques courses dans Penedo.
C’est une cité très touristique et il y a pas mal d’attrape touristes dans les rues.
Nous trouvons quelques rares boutiques intéressantes avec du vrai artisanat entre 3 magasins qui sentent la friture et le gras cancérigène.
Retour à Jazz Village pour reprendre quelques nouvelles de Bretagne, tout va bien.
Tout le monde respire.
Nous allons refaire une balance. Aujourd’hui, Jaco va tenter de donner un cours à Tiago, le jeune technicien de Jazz Village.
Tiago se forme sur le tas et Guga a proposé hier que Jacques-Yves lui donne un petit cours.
Ce sera formation très pratique, on démonte la console de Jazz Village, on met à la place la console numérique de Jaco, on passe de 8 à 36 pistes, tout rentre et est piloté par l’ordinateur avec des réglages précis de retour, équalisation, reverb,…
Bernardo et Carlos sont aux anges!
Le son est superbe rien à voir avec la veille, Tiago comprend pas mal de choses et a le sourire également.
Petite pause et en route vers le concert, il y a davantage de monde ce soir, je ne verra pas Guga car Patricia est souffrante et ils sont restés à Resende.
Nous allons faire un super concert, comme à chaque fois les structures changent,….
Jacques-Yves me dira ne pas avoir reconnu certains morceaux que nous avons joué la veille!!!
Tout fonctionne sur l’écoute, les arrangements se fabriquent en direct, les prises de paroles, les dialogues, les silences,… tout se construit sur le vif!
J’en frissonne.
Ce matin j’ai pris le décès de Yann Fanch Quemener, je vais lui dédier le plinn, il sera particulièrement soigné et profond.
Le concert s’achève, standing ovation, les gens ravis, ils ne savant pas vraiment à quoi correspond la musique qu’ils ont entendus mais ils sont enchantés par l’énergie, la générosité, l’écoute, le partage, les surprises,…
Tout le monde est très content, nous échangeons avec le public après le concert et les retours sont très touchants.
Dimanche 17 Mars
Aujourd’hui, c’est le départ vers Rio de Janeiro. Nous allons faire quelques vidéos pour la promotion de « Sopro da Terra » après le petit déjeuner. Carlos nous explique qu’il a eu de nombreux beaux commentaires sur le concert d’hier.
Une jeune chanteuse très brillante était là et elle a dit à Carlos que cette musique ouvrait de nouveaux horizons aux artistes, l’ouverture, l’espace, la place laissée à l’imagination du musicien mais aussi à celle du public était un cadeau plein de qualité et de respect que nous avions offert.
Pendant que Jacques-Yves fait d’ultimes courses, je retrouve Guga. Patricia est un peu souffrante et il peu de temps. Nous échangeons beaucoup sur le présent et l’avenir. Il m’explique que le lieu il y a 50 ans n’était que plantations de café et prairies sans arbres. J’ai du mal à le croire tant les palmiers, manguiers, bananiers,.. son grands et majestueux, on dirait qu’ils sont là depuis toujours. Guga m’explique que tout repousse depuis 50/60 ans,…. quelle puissance… je prendrai à la réception un document expliquant l’histoire de ce lieu incroyable.
Guga aimerait que l’on travaille ensemble autour de l’école de musique et également autour d’un duo potentiel. Nous allons y réfléchir. Je passe dire au revoir à la réception et la propriétaire des lieux est là. Elle me remercie pour la musique et le concert d’hier et me dit de revenir quand je veux, la porte sera ouverte… message reçu.
Guga nous dépose à la gare routière de Penedo, nous prenons nos tickets et déjeunons là. l’occasion de continuer à échanger. Les nouvelles de la famille reviennent, toujours un peu tristes,…
Le trajet reprend, je me délecte de ces paysages magnifiques, toujours des plaines, des collines et les montagnes au loin. La végétation luxuriante, quelques prairies ça et là… une nature d’une puissance phénoménale. Ces paysages invitent à la rêverie, à l’imagination, à la découverte,…
Voilà c’est la fin de la deuxième séquence et nous allons maintenant ouvrir le dernier dossier de Jacques-Yves avec la fin de l’enregistrement d’Oficina à Rio De Janeiro.
Tout se passe pour le mieux jusqu’à présent. Je suis étonné de la fluidité avec laquelle les choses s’organisent. Cela fait évidemment près de 20 ans que je travaille sans projet particulier avec le Brésil comme si je suivais ke cours d’une rivière. Bien sûr , il m’a fallu ramer et j’ai beaucoup travaillé entre 2000 et 2015 autour de ces rencontres qui maintenant me reviennent avec une profondeur simple et une poésie magnifique, musicale, professionnelle, humaine, spirituelle, artistique,… Pourvu que ça dure!
Lundi 18 Mars
Il fait très chaud à Rio…… je me suis réveillé à 6h du matin à cause de la chaleur.
Bon, petit déjeuner et au travail. Nous préparons la session de travail, nous ne chômerons pas non plus ici.
Nous passons une partie de la matinée chez Carlos avant d’aller déjeuner à Laranjeiras.
Retour chez Carlos et arrivée au studio vers 14h45.
Je retrouve Ricardo chez qui nous avions enregistré 2 morceaux en 2015 pour l’album de Serendou.
Jacques-Yves s’affaire dans une premier temps au transfert des données et à la synchronisation entre logiciels.
Tout va bien, Bernardo arrive, il nous invite demain à un barbecue avec des amis indiens du fleuve Xingu venus à Rio pour une rencontre entre tribus.
Nous allons enregistrer Pifano Carioca et Sete Santos assez rapidement. Bernardo pose un pandeiro sur Lanranjeiras et s’en repart chez lui.
Nous lui préparerons une session pour faire d’autres percussions à la maison si nécéssaire.
Carlos s’attaque à Laranjeiras et pendant ses prises arrive Augusto Mattoso.
Je suis très heureux de retrouver Augusto qui va enregistrer ses contrebasses demain.
La fin de journée sera folle, Carlos enregistre le Frevo, pose 1,2,3, 4 saxophones, enchaine les prises, avec humour et musicalité,…
Nous finissons à 20h00 les oreilles en feu. Nous avons bien travaillé et demain sera une journée plus tranquille.
Nous faisons le programme de la journée de demain.
Nous nous retrouverons à 10h demain matin avec Augusto et Carlos.
Petite pause à l’appartement avant d’entraîner Jacques-Yves chez Serafim, le restaurant familial de Laranjeiras pour découvrir le Capa do Filè, une préparation de boeuf en sauce que Jaco doit découvrir vù que je dédie un morceau à Serafim.
Retour à l’appartement pour travailler un peu et préparer la journée de demain.
Sommeil difficile ce soir, la tête part dans tous les sens.
Je suis à des milliers de kilomètres de la famille et je pense que ma place serait auprès d’eux… je tourne et retourne…
Mardi 19 Mars
Très mauvaise nuit, j’ai mal dormi… Jacques-Yves non plus, il me dit que la Lune était énorme cette nuit.
Nous retournons au studio.
Je réussis à arriver en avance pour avoir un petit temps de Skype avec mon père et prendre des nouvelles de la famille.
La situation est stable, même si elle n’évolue pas vers un retour à la maison de ma mère.
Ce matin, nous accueillons Augusto Mattoso le contrebassiste.
Il arrive avec une magnifique contrebasse qui a 150 ans. Nous l’appellerons la Lady, elle a un son magnifique, Jacques-Yves est aux anges.
Nous allons laisser Augusto enchaîner les prises et les morceaux et chaque proposition est propos,… simple, juste.
Petite pause déjeuner dans une petite cantine pas bien loin.
Retour au studio, nous terminons avec Augusto et Carlos arrive en pleine forme!
Nous allons encore avoir un après-midi de folie, les prises s’enchaînent et les couleurs du disque se posent vraiment maintenant.
Nous allons tenter plusieurs pistes sen les morceaux, tout fonctionne mais il faut mettre cela en perspective avec le climat global de l’album.
La journée se termine bien même si Jacques-Yves n’a pas réussi à vérifier si tous les transferts d’un logiciel vers l’autre fonctionne.
Il tente de trouver une façon de louer un ProTools pour être sûr que tout va bien.
Retour à notre appartement pour un petit moment avant de repartir chez Bernardo Aguiar où il y a un barbecue ce soir en hommage à des amis indiens de la région de Xingu (Mato Grosso).
Nous arrivons dans un quartier très étonnant. Catete, méandres de rues pavées à flan de montagne.
Ambiance étonnante.
Nous arrivons devant la maison de Bernardo, il est sur un balcon sur le toit.
Il laisse pendre un petit seau et le fait descendre vers nous.
Nous y trouvons la clé pour ouvrir la porte qui nous fait face!
Il y a un peu de monde, nous allons rencontrer une foule de gens intéressants, une réalisatrice qui a fait un très beau film avec Carlos sur le pife de Xingu à Rio en passant par Cariri et Caruaru, des musiciens , des indiens venus participer à un symposium sur la cause Indigène.
Il y aurait tant à dire.
Il se passe aujourd’hui un drame abominable pour les indiens.
L’actuel président a décidé d’ouvrir les terres des indiens à l’exploitation, notamment des ressources souterraines.
La foret risque d’être dévastée par cette nouvelle clique de bandits au pouvoir.
Est également présent Robertinho Silva que j’ai entendu au Blue Note de São Paulo il y a 10 jours. Quel personnage, 77 ans et une pêche magnifique.
Il va jouer toute la soirée, rire et faire rire…
Très vite un boeuf démarre avec des chanteuses magnifiques.
Bernardo vient nous chercher avec Carlos pour jouer Un morceau qui sera très sauvage, superbe!
Le barbecue enfume tout le balcon, d’autant qu’il pleut à présent!!!
C’est trop cocasse!
Bernardo me prend par le bras et m’annonce qu’il y a une petite projection d’un film dans sa chambre sur les indiens.
J’arrive dans une pièce pleine à craquer et voit des extraits du film réalisé avec Carlos sur les flûtes.
C’est effectivement le chapitre sur les indiens.
Tout le monde est attentif et les questions fuseront à l’issue de cette petite séance.
Une petite pause dans un café de Catete avant de rentrer et dodo.
Mercredi 20 Mars
Ce matin je pars avec Carlos chez le pianiste Fernando Moura.
Il habite à Botafogo, nous allons chez lui par une sinueuse route de montagne.
La voiture vibre sur la route pavée,
Rio est une très jolie ville, quelle dommage que l’histoire de ce pays se soit construite sur un modèle très Darwinien ou les gros mangent les petits, justifiant l’esclavage (Le Brésil est le dernier pays au monde à avoir aboli l’esclavage), la répartition inéquitable des richesses entre des riches immensément riches et des pauvres immensément pauvres.
Toute cette construction conduit les petits à envier les gros, les gros ayant peur des petits, on ne se parle plus, on met des barbelés, des caméras, des flics,… on s’arme,… et la vie en société n’a plus de sens. Cette planète appartient au vivant, si nous refusons de partager, d’être conscients,…. nous filons dans le précipice.
Retour chez Fernando, nous sommes au 15ème étage d’un grand immeuble proche de la plage de Botafogo.
Fernando a composé beaucoup de musiques d films et pour ses 60 ans, il a décidé d’éditer un disque de ces musiques réarrangées.
Il a été bouleversé par le duo constitué avec Carlos.
Le côté expérimental, sauvage, improvisant, improvivant,…
Le soucis est que la musique de Fernando est très très écrite et je ne lis pas la musique!!!
Carlos va être, une fois de plus, magnifique, nous allons travailler par paquets de 8-10 mesures, Carlos me chante ce que je dois jouer et nous enregistrons en même temps.
C’est l’idée de Fernando.
J’apprends le terme de « Pedrada », cela veut dire les pierres que l’on balance sur la fenêtre; cela est utilisé pour décrire la musique dissonante, parce que ça dissone beaucoup!!
C’est très beau, 95% d’écriture que nous allons enregistrer tranquillement et 5% d’improvisation pour un hommage à l’Amazonie.
C’est super beau!!!
Fernando est un très très fin compositeur!!
Nous buvons un café, un verre d’eau et discutons de musique et cela glisse vers la visite du Président Brésilien aux USA.
Il est allé directement, sans même se cacher, avec son ministre de la justice rendre visite aux bureaux de la CIA.
La collusion des USA avec la situation dramatique du Brésil d’aujourd’hui s’étale en place publique, sans honte, sans pudeur.
Ce pays va aller très mal dans les prochaines années…. et cela commencera bientôt avec la déstabilisation à venir du Venezuela.
Les amis me disent que la disparition des visas pour entrer au Brésil pour les Nord Américains va permettre de laisser entrer des gens dont la mission sera d’infiltrer la frontière Vénézuelienne jusqu’à l’éviction de Maduro.
Retour à l’appartement pour retrouver Jacques-Yves et en route vers Flamenco pour enregistrer Bernardo Aguiar.
Il a une pièce dédiée à ses percussions dans l’appartement familial et préfère faire les prises du disque dans sa pièce où il a toutes ses percussions.
Nous commençons par boire un café et discutons là aussi de politique.
Bernardo relève la tête mais il a accusé le coup cet hiver très durement surtout pour les gens qu’il a rencontré dans le Nordeste du pays.
Lula a installé dans cette zone très dure et très pauvre, écoles, dispensaires, routes, hôpitaux, éducation,… tout cela est extrêmement menacé également.
J’apprends qu’en France, on va sortir l’armée dans les prochains week-ends…. mais où va t’on? Quelle folie? Ces escalades ne vont mener qu’au chaos!
Revenons à la musique, Bernardo va être magnifique de rigueur, d’inspiration, de réalisation,…
Il importe les fichiers dans son ordinateur et va enchaîner les prises avec pertinence et précision.
Sur le Maracatu il pose Pandeiro, Alafaïa, cloches,.. Sur la Samba: pandeiro, caisse claire recoreco de mola, sourdeau, repique,…
Sur Sete Santos: Zabumba, contra sourdeau, caixa, sementes (graines)
Il ramène de l’organique,.. de la peau du bois, des graines,… les morceaux prennent une autre dimension, je sens les orixas venir tourner sur cette séance,… les esprits des esclaves africains seront avec nous aujourd’hui et nous gravons, gravons,…
Jacques-Yves est déjà en joie de travailler sur le mixage de cette musique.
Pour l’instant, il sait que le temps est compté, il multiplie les vidéos, les photos pendant que Bernardo enregistre ses prises.
De mon côté, je commence à voir clair dans l’organisation à venir de cette musique et ce mixage que j’aimerais lent et tranquille tellement nous avons ramené de choses.
Nous terminons vers 18h00, le temps de faire les transfert de fichiers, je me reconnecter à la France, à Paris, à la Bretagne, la situation au niveau familial est stable, cela veut dire que ça ne bouge pas, ni en mal, ni en bien.
Cela doit difficile à vivre pour ma mère et les proches,… statu quo.
Nous rentrons à Lanrajeiras, dernier dîner chez Serafim pour Jacques-Yves qui est en vacances ce soir.
Je vais donc l’envoyer au Forro.
Le Forro est un grand bal très sensuel ouvert à tous (For All).
Nous allons dans le quartier très connu de Lappa (le grand aqueduc de Rio, c’est là)
On sent ici la présence du patrimoine immobilier colonial, de vieux batiments mal entretenus mais restant plein de charmes nous entourent.
Il y a des bars, des restaurants,… mais cela sent un peu le coupe gorge aussi.
Nous trouvons le lieu où cela se passe, sorte d’énorme friche réhabilitée, nous gravissons de longs escaliers et arrivons au Forro.
Il y a un sextet qui joue, flûte, Bandolim, guitare, percussions, batterie, basse. ça joue super, je connais les musiciens et je sais que la soirée sera bonne.
La piste de danse est bien garnie déjà.
Comme dans le cadre d’un fest-noz, le public n’arrivera que vers 22h00 et les musiciens joueront 3 sets.
Le volume est bien sûr un peu fort mais ça joue et ça danse. Woaw, Woaw,… je vois que Jacques-Yves est ravi d’être là.
Nous avons passé plus de 2 semaines bien intenses de travail dans un pays que Jacques-Yves ne connaissait pas.
Ce fût une super expérience,
Les séances de studio, les répétitions, les concerts, le quotidien, les repas, les voyages, … et les gens…
Parce que c’est là où tout se joue!
Tout l’essence de mon cheminement au Brésil est à cet endroit.
Les gens, l’humain, la générosité, l’humilité, l’amour, la connaissance, le partage, l’écoute,…
Nous retrouvons Bernardo, il nous explique les différents rythmes inspirant le Forro, le Coco, …
A la pause du groupe un DJ prend le relais, sa playlist est très intéressante et la piste de danse ne désemplit pas.
A un moment une capoeira se met en place.. cela va être magnifique.
Cette danse/art martial venue au Brésil par les esclaves africains est très spectaculaire.
J’en ai déjà vu plusieurs fois mais là,… il y a des danseurs incroyables!
Les hommes et les femmes se relaient, se provoquent, jouent ensemble, s’éffleurent avec précision et une rapidité hallucinante.
Magnifique!!
La dernière soirée de Jacques-Yves sera très belle!!
Retour à l’appartement, demain, on se lève tôt.
Jeudi 21 Mars,
C’est le printemps il va pleuvoir toute la journée… en fait, c’est le printemps chez nous mais l’automne arrive ici.
Ce matin, je dis au revoir à Jacques-Yves qui partira de bonne heure, de peur de soucis avec ses deux grosses valises à l’aéroport.
Ensuite, je me remets le nez dans mon journal que j’ai un peu négligé ces derniers jours
Je pars vers midi rendre visite à Renan Montuno un fabriquant de Pifano résidant à Santa Tereza.
Je suis attaché à ce quartier historique de Rio car c’est là où je résidais lors de mon premier séjour à Rio en 2013, il y a 6 ans déjà.
C’est un vieux quartier aux architectures coloniales très joli même s’il est réputé être très dangereux.
Renan m’attend, je vais passer un peu de temps à essayer des flûtes.
Il fait du très bon travail même si je ne suis pas un grand connaisseur en matière de Pifanos.
Je trouve qu’ils sonnent même si je fais remarquer à Renan qu’il faut qu’il fasse attention à l’ergonomie s’il ne veut pas que ses clients aient des tendinites à la main droite.
Nous aurons une discussion sur la fabrication des flutes et nous irons déjeuner dans la cantine du quartier.
Je suis très content de me poser ici, la patronne est plutôt antipathique mais la rustique cuisine de boeuf, riz, feijão, farofa et salade est délicieuse.
Nous allons ouvrir la discussions sur l’élagage et les plantes car Renan travaille aussi dans cette branche. nous arriverons à nous brancher sur Piracaia, la ville où je vais demain.
Personne ne connait Piracaïa à Rio à part Renan qui veut aussi aller par là-bas pour quitter la ville et se reconnecter à la nature, comme Vitor et Camila,…
Tiens c’est drôle, je me rappelle maintenant avoir offert un pifano de Renan à Camila, je lui dit que Camila fabrique elle même ses huiles il se branche immédiatement,…; synchronicité???
Inévitablement nous parlerons politique, l’ancien président Temer, est en prison depuis ce matin.
Cela fait 2 anciens présidents en prison et 4 gouverneurs de l’Etat de Rio, pour corruption.
Quel drôle de pays…..
Je repars car j’ai un rendez-vous avec Ionà au Consulat, rapide rencontre, nous parlons du présent et du futur et tentons de réfléchir à une collaboration pour Août 2020.
Je rentre à Laranjeiras et me pose pour « Discançar um pocou » défatiguer un peu, j’aime bien ce privatif très breton.
Je fais mes préparatifs pour le concert au Triboz, prend un taxi et retrouve tout le monde la bas.
Il pleut beaucoup beaucoup maintenant, une pluie tropicale au larges et chaudes goutes assez inhabituelles pour moi.
Le chauffeur me chante une chanson de Tom Jobim aux paroles magnifiques
Águas de Março
Les eaux de Mars
É pau, é pedra, é o fim do caminho
C’est un bâton, c’est une pierre, c’est le bout du chemin
É um resto de toco, é um pouco sozinho
C’est un reste de souche, c’est un peu solitaire
É um caco de vidro, é a vida, é o sol
C’est un éclat de verre, c’est la vie, le soleil
É a noite, é a morte, é um laço, é o anzol
C’est la nuit, c’est la mort, c’est un piège, un hameçon
É peroba do campo, é o nó da madeira
C’est un peroba (1) des champs, c’est un nœud dans le bois
Caingá, candeia, é o Matita Pereira
Caingá, candeia, c’est un Matita Pereira (1)
É madeira de vento, tombo da ribanceira
C’est le bois du vent, une chute de la falaise
É o mistério profundo, é o queira ou não queira
C’est un mystère profond, c’est tu veux ou tu veux pas
É o vento ventando, é o fim da ladeira
C’est un vent qui souffle, c’est le bas de la pente
É a viga, é o vão, festa da cumeeira
C’est la poutre, c’est le vide, la fête de la colline
É a chuva chovendo, é conversa ribeira
C’est la pluie battante, c’est le discours de la rive
Das águas de março, é o fim da canseira
Les eaux de mars, c’est la fin de la lassitude
É o pé, é o chão, é a marcha estradeira
C’est le pied c’est le sol, c’est une marche de promeneur
Passarinho na mão, pedra de atiradeira
Un oiseau dans la main, une pierre de catapulte
É uma ave no céu, é uma ave no chão
Un oiseau dans le ciel, un oiseau sur le sol
É um regato, é uma fonte, é um pedaço de pão
C’est un ruisseau, c’est une source,c’est une tranche de pain
É o fundo do poço, é o fim do caminho
C’est le fond du puits, c’est la fin du chemin
No rosto o desgosto, é um pouco sozinho
Sur le visage du dégoût, c’est un peu solitaire
É um estrepe, é um prego, é uma conta, é um conto
C’est une écharde, c’est un clou, c’est un compte c’est un conte
É uma ponta, é um ponto, é um pingo pingando
C’est un pieu , c’est un point, une goutte qui s’égoutte
É um peixe, é um gesto, é uma prata brilhando
C’est un poisson, c’est un geste, c’est de l’argent brillant
É a luz da manhã, é o tijolo chegando
C’est la lumière matinale,c’est la brique qui vient
É a lenha, é o dia, é o fim da picada
C’est une bûche, c’est le jour, c’est la fin de la piste
É a garrafa de cana, o estilhaço na estrada
C’est une bouteille de cana (2), un obus sur la piste
É o projeto da casa, é o corpo na cama
C’est le plan de la maison, c’est un corps dans le lit
É o carro enguiçado, é a lama, é a lama
C’est une voiture en panne, c’est la boue, c’est la boue
É um passo, é uma ponte, é um sapo, é uma rã
C’est un pas c’est un pont, un crapaud une grenouille
É um resto de mato, na luz da manhã
C’est un reste de buisson à la lumière matinale
São as águas de março fechando o verão
Ce sont les eaux de mars, clôturant l’été
É a promessa de vida no teu coração
C’est la promesse de vie dans ton cœur
É uma cobra, é um pau, é João, é José
C’est un cobra , un bâton , c’est Jean et José
É um espinho na mão, é um corte no pé
C’est une épine dans la main, c’est une coupure au pied
É um passo, é uma ponte, é um sapo, é uma rã
Un pas, un pont, un crapaud , une grenouille
É um belo horizonte, é uma febre terçã
C’est un bel horizon, c’est une fièvre maligne
São as águas de março fechando o verão
Ce sont les eaux de mars qui clôturent l’été
É a promessa de vida no teu coração
C’est la promesse de vie dans ton cœur
(1) arbres tropicaux
(2) boisson alcoolisée locale
et
J’arrive sous la pluie et le vent au Triboz.
C’est un centre culturel Brasilo-Australien où j’ai déjà joué 2 fois.
J’y retrouve Carlos, Augusto Mattoso, Bernardo arrivera plus tard.
Nous faisons une petite balance, je retrouve les gens du Triboz avec plaisir, Mike le patron musicien australien toujours très altruiste.
Le concert se passera bien, pas trop de monde ce soir. les cariocas n’aiment pas la pluie, elle les rend tristes et ils ne sortent plus.
Nous jouerons bien quand même, l’expérience des derniers jours, renforce la musique, la place de chacun.
La famille de Carlos est là ce soir, son père, son frère,… ce sera une soirée très sympa, tout en douceur pour quitter Rio.
Je dîne après le repas et discute avec Renan et sa copine, Bernardo, Carlos,.. il faut rentrer.
Nous prenons un taxi ensemble avec Carlos et Danièle et nous parlons de la suite sans savoir vraiment quand nous allons nous revoir.
Je repars avec Zingaro intensément fin avril et les temps disponibles seront rares.
Nous verrons bien, nous sommes sûrs que nous allons nous revoir bientôt.
Vendredi 22
J’ai mal dormi, peut-être le stress.
Je n’arrive pas à faire le check-in de mon vol, ma carte bleue ne passe pas.
Je me prépare et j’arrive avec plus de 2 heures d’avance à Santos Dumont, l’aéroport qui a les pieds dans l’eau à Rio.
Je réussirai à faire le check-in, payer ma valise et je me pose sur la zone de départ en regardant les gens, le paysage, les cargos qui quittent la baie de Rio et qui passent juste devant l’aéroport.
Je retrouve Vitor à São Paulo et nous prenons la direction de Piracaïa pour mon dernier concert au Brésil de cette série.
Nous échangeons sur les uns et les autres et toutes les aventures que nous avons vécu depuis 1 semaine …. il s’est passé tant de choses.
Nous arrivons à Piracaïa, petite ville de campagne très mignon où Vitor et Camila envisageaient peut-être de bouger un jour.
Nous déjeunons ensemble, discutons de la soirée de la veille que les amis ont vécu ici.
Camila vient de sortir un nouveau livre de Haïkus et a fait une présentation hier ici.
Tout s’est bien passé et Camilla est très heureuse de cette nouvelle édition.
Après une petite sieste, nous partons nous installer à la Casa Viva.
C’est une sorte de café, salon de thé, lieu culturel de rencontre comme on en trouve de plus en plus en France.
On sent le lieu habité par la curiosité, l’altérité, l’art, la culture, l’éducation et tout ce qui peut permettre de stimuler l’imagination.
Luis nous attend, je dois me reprogrammer une session de Logelloop pour le lieu et le système son.
Je discute avec Vitor et nous partons sur un optique de départ en solo, puis j’invite Vitor, puis Luis à la guitare.
Nous testons les morceaux, tout va bien.
Nous jouerons des standards du choro avec Luis.
Petit retour à la maison, Camila et Silvana nous attendent pour me donner un petit spectacle entre théâtre d’ombre et théâtre d’objets.
Je serai le spectateur privilégié d’une petite forme poétique magnifique, basée sur les haïkus de Camila, Silvana a créé un univers très simple et très sensible.
Il y’a de la poésie autour de moi ce soir, je savoure.
J’ai quelques nouvelles de Bretagne et apparemment il y a un peu d’amélioration,…. je prends tout comme positif et pense très fort à mes proches.
Retour à la Casa Viva, la soirée va passer très vite.
Les morceaux s’enchainent et l’écoute est encore très belle ce soir.
Il y a même 3 femmes venues de São Paulo suite au concert de Kerlavéo au Museu da Casa Brasileira.
Nous avons 3 fans, ça y est c’est la gloire!!!
Le concert se passera très bien et les échanges à l’issue du spectacle seront très profonds.
La politique revient…. demain Macron a prévu de sortir l’armée, ici la dictature revient,…
Le juge qui a mis Lula en prison vient de recevoir une fortune des USA, une dette de Petrobras que les USA ont directement reversé à la fondation du juge, il y en a pour des millards….
Je ne fera pas de vieux os ce soir.
La fatigue de ces 2/3 semaines commence à se faire sentir,… je sens les heures de sommeil en retard.
Je prends congé pour une belle et profonde nuit, demain c’est pause!
Samedi 23
J’ai bien dormi,…. j’en avais besoin je crois.
Ce matin, petit déjeuner en famille avant de partir vers le littoral.
Nous allons rouler 3-4h dans un paysage très beau avant de rentrer dans la Serra do Mar, une chaine de montagne de plus de 400kms de long longeant le littoral et tapissé d’une végétation tropicale luxuriante, de la foret, de la foret, de temps entrecoupée d’une cascade magnifique!!
Quelle puissante nature, nous continuons à cheminer et le paysage devient de plus en plus impressionnant.
Nous finissons par arriver à Sahy où nous resterons 2 jours. ça sent le repos, la plage est à 300m.
Nous nous posons près de la piscine, l’occasion d’une belle discussion avec Camila avant d’aller marcher avec Vitor sur la plage.
Le paysage est splendide, les amis là me font un merveilleux cadeau.
Je vais reprendre des forces ici.
Nous marchons sur la plage les pieds dans l’eau à 22 degrés. Il y a de fortes vagues par endroit.
Quand la mer se retire, le sable est quadrillé parfaitement!!!
Je retrouve les motifs que existent dans l’artisanat indien!! Magnifique!!!
Dimanche 24
Très bien dormi, aujourd’hui, programme tranquille.
Nous allons aller à la mer, discuter, nous poser, j’apprend encore beaucoup de choses sur es Orixas auprès de Camila.
Aujourd’hui je découvre Iroko.
Nous allons marcher dans la foret avec Vitor et voyons un colibri que l’on appelle ici beija flor (embrasse fleur, trop mignon).
Je tente de contacter la famille sans succès entre le décalage horaire et la connexion intermittente ici, je ne vais pas réussir à parler à ma mère.
C’est dommage.
Retour à la vie au Brésil, nous confrontons nos visions du monde avec Vitor.
Pour la politique, le constat est navrant des 2 côtés, Ici le Crazydent gouverne par tweet alors que chez nous le Méprisant décide d’envoyer l’armée.
Vitor me lit les commentaires faits sur la France dans une journal connu ici.
C’est navrant, toujours les mêmes discours car les journaux appartiennent à la même caste…
Je lui trouve un article du blog de Médiapart
https://blogs.mediapart.fr/guillaume-quintin/blog/220319/pourquoi-macron-ne-cedera-pas-aux-gilets-jaunes?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66&fbclid=IwAR3Njddekn_e4b2g9CQAC5d1zLR2n-YkxdicJD-a7O0lzEA5FRtfzLDomXw
voilà, tout est dit, le chaos peut arriver…
Je retourne prendre un bain nocturne, j’en profite pour faire des prises de sons, il n’y a pas de vent… je vais enfin pouvoir faire une vraie prise de son de l’océan.
Retour à la chambre et au lit de bonne heure.
Demain retour à São Paulo.
Lundi 25 Mars
Aujourd’hui, on prépare le retour vers São Paulo.
Dernière ballade à la plage.
On discute de nature, je découvre le Melaleoca, un arbre très accueillant sur lequel pousse de multiples plantes et fleurs, Camila l’utilise pour base de ses huiles de soin. … en fait , c’est le Tea Tree.
Nous rentrons par la montagne, les paysages se succèdent divers, multiples, la mer, la montagne, la forêt, les raffineries,…
Nous écoutons Gilberto Gil, magnifiques chansons, magnifique paroles,… « « O melhor lugar du monde è qui é agora » le meilleur endroit du monde est ici et maintenant.
Nous arrivons à Butantã, nous enchainons par des courses et préparons l’arrivée éminente de Rui et Pedro bassiste et batteur de Kerlaveo pour une petite réunion pour parler de leur éventuelle venue en France en 2020.
Puis arrive Daniel Murray qui vient m’apprendre la recette du couscous brésilien à base de farine de maïs et de fécule de manioc.
Arrive Silvana enfin avec des cadeaux pour moi, trop gentille!
Nous rediscuterons de la pertinence du titre Oficina, ici le sens général du terme est garage mécanique, … plutôt rustique.
On me pousse depuis 3 semaines à trouver un titre qui soit plus poétique.
Après discussion autour de « Musica de Oficina », c’est « Oficina Itinerante » qui ralliera tous les suffrages.
Super!
Mardi 25 mars
Préparatifs du départ, je fais une dernière lessive, range mes affaires, fais mon check-in,….
Déjeuner léger avec de l’Orapronobis – Ora Pro Nobis, le Groseillier des Barbades, succulent et très sain.
Après-midi consacré à une exposition dédiée à un poête très connu ici, Manuel De Barros. Camila a eu l’occasion de le rencontrer et sa façon d’en parler est très belle.
Je ne comprends pas grand chose car la poésie est très imagée mais je retiens « Tout comme la peinture travaille avec les couleurs, la musique travaille avec les sons, la poésie est le miel des lettres. »
Ensuite, petit tour dans le quartier avant de revenir travailler chez Vitor.
La musique d’abord, Vitor part demain loin avec son groupe Chorando As Pitangas et moi je dois enregistrer un morceau pour le disque de Camila Lordy.
Les discussions continuent ce soir, nous parlons cinéma Brésilien et mes progrès en portugais.
On me conseille des films bien sûr.
Ele o Boto
Voilà un film qui m’a l’air bien déglingué.
Un message d’Air France me signale que mon vol part avec 4 heures de retard, soit… pourvu qu’il ne soit pas annulé comme pour Jacques-Yves la semaine dernière.
Ensuite, dernière réunion Spedidam pour le disque.
Je dois ramener un document rempli et signé par tous les musiciens ayant joué sur le disque.
On va déjà remplir ce que l’on peut ce soir.
Un dernier verre entre amis, nous sommes très contents de ce qui s’est passé sur ce séjour.
Aucun soucis, les relations sont justes, la musique et le travail suivent,…
Nous avons écrit un nouveau chapitre de notre histoire commune.
La suite…. difficile à prévoir, Zingaro prend beaucoup de temps et personne ne sais où nous serons dans 6 mois, entre l’extrême droite au pouvoir au Brésil et une tyrannie au sens Platonicien du terme qui pointe le bout de son triste nez en France…
Nous gardons notre optimisme malgré tout, nous connaissons la force de la musique, de l’art, de la poésie,..
Nous nous quitterons plein de joie et de force.
Mercredi 26 Mars
L’Algérie, l’armée lâche le président, voilà un bel exemple à suivre…
Tant les images que je reçois m’alarment sur la situation en France.
Ce matin, nous nous levons tôt, Vitor et Camila partent tôt, à 7h00 la maison est vide.
Pedro Ito, le batteur de Kerlaveo vient me chercher pour enregistrer une partie de flute pour le disque de Camila Lordy.
Une compositrice de São Paulo qui travaille sur un livre parlant d’un voyage au tour du monde avec histoires et musiques.
Elle cherche une ambiance de flûte turque, je vais essayer de m’y coller.
Pedro passe me prendre, nous allons nous installer et je vais faire les prises tranquillement avec la présence de Camila qui sait ce qu’elle veut.
C’est toujours un exercice précieux de se mettre au service de l’univers de quelqu’un.
La séance se passera très bien, le piano de Camila est envoutant.. le climat du morceau est superbe.
J’enregistre un peu de matière qu’is utiliseront comme bon leur semble.
Camila me ramène à la maison, je retrouve mes bagages et me prépare au départ.
Le temps d’un rapide bilan de ce séjour merveilleux, sources de surprises à chaque fois magnifiques.
Les graines plantées il y a 20 ans ont germé et donné de bien beaux fruits, je m’étonne encore de la fluidité avec lesquelles les choses se sont passées.
Voici la fin de ce carnet de voyage.
Je vous souhaite bien du bonheur et de la découverte.
Malgré les tensions et la tristesse du monde, restent les hommes, la nature, tout ce qui est vivant autour de nous et qui nous rappelle que nous sommes vivants chaque jour, éléments minuscules et nécessaires d’un grand tout.
Un grand merci à La Cie Hirundo Rustica, La Région Bretagne, l’Institut Français pour l’accompagnement de cette mangifique aventure. Un grand merci aux relais locaux, Museu Da Casa Brasileira, Triboz, Casa Viva, Jazz Village, les studios Arsis et Umuarama, Vivi, …
Les 2 piliers sur place, Vitor et Carlos et tot le monde autour, Kerlavéo, Daniel Murray, Julio Cesar, Fernando Moura, Augusto Mattoso, Sopro Da Terra, Camila Lordy,… et tant d’autres…. Camila, Madhu, Danielle,.. Muito Obrigado!!!!