Jeudi 7 Juillet
Voilà, je repars en compagnie de David « Hopi » Hopkins vers la Lozère.
Ce sera un long voyage vers la commune de Chanac où nous participons au festival « Détours du Monde ». Aujourd’hui, nous faisons une première partie du trajet et ferons escale chez l’amie Francine à St Pierre D’Aurillac.
Étrange de revenir à St Pierre si peu de temps après le festival. Le voyage se passe bien, il fait chaud, nous discutons, écoutons de la musique et arrivons en début de soirée chez Francine. Elle nous a préparé un superbe repas, l’énergie est toujours douce ici, et nous allons passer une belle soirée, très fine et raffinée autour de ce bon repas. Une bonne nuit s’impose, le programme est chargé dans les prochaines heures.
Vendredi 8 Juillet
Levés de bonne heure, nous reprenons la route vers Chanac, nous allons encore rouler quelques heures et arriver vers 13h30 à Chanac où nous sommes attendus par Aurore, Laurie et Fafa. Nous prenons le temps de comprendre où nous sommes et le contenu du projet associatif de Chanac. L’énergie est douce et sérieuse. Après une rapide visite aux bureaux de l’association, nous allons installer Flutorama à l’église de la Piguière sur la commune de Saint Georges de Lévéjac. Nous sommes attendus par les gens du village qui sont charmants et aux petits soins, ils veulent que tout se passe bien pour nous. L’église est très belle mais l’acoustique est rédhibitoire pour les percussions, nous aménagerons notre programme en fonction des choses que nous ferons dans la journée. Nous installerons tranquillement notre affaire et reviendrons vers Chanac en fin de journée., La route du retour vers Chanac est magnifique, des paysages à couper le souffle, c’est grandiose, il règne ici un calme et une sérénité liées à ces ambiances montagnardes.
Nous sommes bien petits dans cet ensemble majestueux. Retour à Chanac, après une petite douche, je retrouve Hopi pour un apéritif et nous en profiterons pour jouer quelques morceaux à la terrasse du Relais. Tout va bien. Arrivent Adnen, Imed et Floran, ce sont les retrouvailles depuis l’émouvante expérience de Sbeitla en avril dernier. Nous avons plein de choses à nous dire et échangerons avec beaucoup d’amour et de passion durant le dîner.
Samedi 9 Juillet
Nous devons partir de bonne heure vers le « Point Sublime » . L’endroit porte bien son nom, c’est magnifique!
Nous allons partir pour une marche très tranquille dans ces merveilleux paysages ponctuée par des interventions de Adnen Helali, Imed et moi pour terminer. Adnen est toujours magnifique, tout en douceur, en poésie et en profondeur. il est d’une force incroyable car vit dans un environnement si dur.
Il nous parle de la vie dans les montagnes, de la guerre, des mines, des femmes qui ont sauté sur les mines lors de la dernière cueillette du romarin il y a quelques jours. C’est bouleversant. Imed prendra ensuite la parole avec poésie et classe, un beau solo de Bendir pour terminer avant de continuer le chemin vers le déjeuner. J’interviendrai à notre arrivée à la ferme de Combelasais.
Après un bon repas préparé par les bénévoles à partir de produits locaux, nous partons vers la maison Aragonaise – ferme des Monziols pour la suite du programme. Là encore, le lieu est magnifique, une splendide architecture, des techniques de batiments que je ne connaissais pas à partir de cette pierre calcaire que l’on voit partout ici.
Après une présentation du lieu, Adnen et Imed vont démarrer, après une présentation de la tête des Bergers de Sbeitla, Adnen va chanter et danser accompagné par Imed.
Nous arriverons ensuite pour quelques morceaux en duo avant d’inviter Imed à nous rejoindre pour 2/3 Morceaux. Tout se passe bien, l’écoute est là, la proposition semble acceptée, superbe.
Pas de temps à perdre, c’est un vrai marathon aujourd’hui, nous devons filer pour jouer le Flutorama à l’église de la Piguière. Le public est déjà là, nous aurons un soucis de vidéo-projecteur qui nous fera démarrer la conférence concert avec du retard et sans le diaporama indispensable.
Tout ira vite, l’acoustique est difficile pour les voix mais les flûtes résonnent merveilleusement bien. Ensuite, Flutorama demande de l’attention et les contraintes de l’acoustique, de cette journée marathon pour nous comme pour le public vont faire que nous perdre un peu de monde en cours de route. Mais au final, les applaudissements sont nourris et les gens semblent heureux d’avoir reçu cette fenêtre d’ouverture sur le monde par le biais de la flûte. Nous devons terminer rapidement et vite bouger car la journée n’est pas terminée. Il nous faut aller maintenant au village de Massegros pour le final avec Imed et Adnen.
Nous jouons sur la place du village, il y encore du monde et avec la petite scène et la petite sono, nous allons jouer 45mn avec Adnen qui chante, danse, transmet son incroyable enthousiasme autour de lui.
Un petit verre et nous retournons à l’église démonter et charge le matériel de Flutorama. Retour à Chanac à 22H45 pour un dîner avec tous les amis. Woaw! Quelle journée! Nous sommes rincés! Hopi comme moi. Nous avons le sentiment d’avoir contribué à une belle idée mais nous avons donné toute la journée et quand la tension se relâche, nous tombons de fatigue. Le dîner sera très sympa mais au retour au gîte à 1h00 du matin, je m’effondre sur le lit et m’endort immédiatement.
Dimanche 10 Juillet
Ce matin, réveil matinal mais je prends un petit temps de grasse matinée avant de retrouver Adnen, Imed et Hopi. Ces deux derniers nous quittent et je vais passer le reste de la semaine avec Adnen pour de nouvelles aventures.
C’est le jour du marché, je vais me faire quelques courses, acheter des fruits et du fromage pour le gîte,
je m’arrête boire un café et partage un petit temps avec Yves, un des bénévoles du festival qui passait par là. Retour au gîte, je me renseigne sur l’internet, la piscine, et me mets au travail, répondre à des mails qui attendent depuis quelques jours, rédiger quelques articles pour le blog,.
Je discute avec Adnen, de son projet à Sbeitla, il se bat pour la création d’un centre culturel de la montagne Semmama afin de travailler sur l’éducation des jeunes, redonner de la dignité à cette population de montagnards, il me parle des lacunes en éducation de la région; de la vision des Tunisiens sur cette région,.. Nous parlons à bâtons rompus de la vie en Tunisie, cet homme est incroyable d’implication, de dévouement et de convictions. Je suis impressionné par cette posture si ferme et si douce en même temps. L’après-midi sera studieuse et nous dînerons en soirée avec Aurore et Laurie du festival, doux repas avant que tout le monde ne s’en aille voir le match de foot. Je préfère de mon côté rester calme au gîte, loin de l’hystérie collective et des clameurs trop proches du nationalisme, …à mon goût.
Lundi 11 Juillet
Levé de bonne heure, au travail, je rouvre Logelloop et me mets au travail pour tenter de préparer des réglages liés aux différentes interventions que je devrai réaliser cette semaine.
Adnen se lève, nous discutons un peu avant de nous remettre au travail.
Nous allons déjeuner dans les bureaux du festival.il y a là, une ruche active et dynamique, beaucoup de bénévoles qui s’affairent dans l’organisation, la régie, la décoration,.. L’ambiance est bonne même si tout le monde est concentré sur les multiples tâches.
L’après-midi sera consacré à un petit travail en solo ponctué de jolies discussions avec Adnen, je vais donc travailler et retrouver ma flûte, puis noua partons avec Adnen pour une petite promenade à Mende située à 20kms, nous avons quelques achats à faire.
Nous continuons la discussion en chemin, passons près d’une commune au bien beau nom.
Après un dîner tranquille, nous revenons vers Chanac et Aurore que nous devions retrouver nous annonce qu’elle s’est coupé le doigt. Nous passons, juste la saluer et boire un verre avec Laurie et un autre bénévole et rentrons au gîte. Une fois sur place, nous allons continuer à discuter sur Pierre Rabhi que Adnen découvre, Albert Jacquard,.. autour de valeurs, d’éthique, de philosophie et de poésie. Tout va bien, la compagnie de Adnen est douce et profonde, nos échanges sont tranquilles et sérieux en même temps. Quel personnage!!
Mardi 12 Juillet
Ce matin, rendez-vous à 9h30 dans les bureaux du festival pour aller au Centre de Loisirs rencontrer des enfants. Je vais y passer la matinée, pas simple de faire passer un message ) ces petits qui ne savent pas vraiment à qui ils ont affaire. Je vais présenter les flûtes, parler d’improvisation, d’écoute, nous allons faire des jeux avec des bouteilles, des exercices avec la voix, les mains, le corps et terminer en ensemble.
Nous verrons bien ce qu’il en restera, la fin fût sympathique, je commençais à trouver le chemin pour essayer des petites choses avec eux.
Je rentre déjeuner avec Adnen et l’après-midi sera consacrée à des travaux personnels. Départ vers Ispagnac, les paysages sont magnifiques, les massifs montagneux sont impressionnants et majestueux.
Nous serpentons dans ces routes sinueuses sous les regard de ces blocs minéraux massifs et plein de force. L’ambiance est bonne, nous suivons Aurore et 2 jeunes bénévoles qui vont nous aider à installer le concert. La bonne humeur règne dans la voiture au son de la magnifique musique de Lea Freire et Teco Cardoso, nous avons de belles discussions avec Adnen et prenons le temps d’échanger tout en nous émerveillant de la beauté des paysages. Soudain, il faut s’arrêter, un troupeau de moutons traverse la route. Après une descente impressionnante sur ces routes de montagne nous arrivons enfin à Ispagnac. Le village est très beau, très calme, il règne ici une douceur et une paix palpable.
Nous installons le matériel, j’ai prévu un petit système son car la salle est toute petite. Après un temps de préparation avec Adnen, je vais me promener dans le centre du village. Ce soir, nous allons improviser à la lumière des quelques expériences récentes. Nous échafaudons un schéma de concert,, ponctué de duo, de solos, de choses convenues et des choses très improvisées L’écoute fera le reste. Je profite de ma promenade pour acheter du fromage et un peu de vin et retrouve Aurore et les 2 jeunes qui installent l’exposition de Adnen sur la fête des Bergers. Nous allons ensuite dîner dans la bibliothèque et retrouvons toute une équipe associative qui nous reçoit avec une belle générosité. Ayant une alimentation particulière, les gens qui nous accueillent m’ont préparer des plats spéciaux. C’est super gentil mais je leur demande s’ils ont prévu de me garder toute la semaine tant les quantités qui me sont destinées sont impressionnantes!! Le repas sera consacré à des échanges sur les gens d’Ispagnac, cette ambiance particulière, cette implication associative dans cette belle bibliothèque à la riche proposition de livres pour un village de 600 habitants. Merveilleux. Cela me touche toujours de rencontrer des gens aussi impliqués dans une vie associative de village. Cette conscience du monde, de l’écologie, de la culture, de l’éducation fait beaucoup beaucoup de bien et réchauffe le coeur. Nous allons à la salle, il y a du monde qui attend et la petite salle sera vite remplie d’oreilles très attentives. Après une présentation d’Aurore et d’une personne de l’association qui nous accueille, Adnen prend la parole est me laisse dire un mot. Puis, nous commençons. L’écoute de la salle est là, perceptible, concrète, je lève les yeux et croise des regards plein d’attention.
Ce sera un concert magnifique, plein émotions, de puissance, de poésie, de respect d’écoute et de force. Adnen est d’un charisme magnifique, il passe de la danse et du chant populaire à une description bouleversante des corps déchiquetés des femmes cueillant le romarin à Sbeitla et dont la vie s’est arrêtée à cause des mines posées là par les djihadistes. Il me propose une version de déserteur de Boris Vian en arabe. Nous ferons un duo plein d’écoute, de fragilité, de puissance et d’émotions. L’engagement poétique et politique d’Adnen est total. Il dégage une énergie que je ressens directement à sa droite durant ce temps commun de spectacle. Je suis très très concentré, tout en écoute et soutien de cette parole si forte. Les morceaux s’enchainent, je fais quelques respirations instrumentales histoires de laisser le public digérer la charge émotionnelle apportée par Adnen. Il revient et nous transporte de nouveau,.. il me fait une surprise incroyable, je ne sais pas quand ni comment il a réussi à imprimer mon carnet de voyage Tunisien et il commence une lecture d’un extrait de ce carnet sans m’avoir prévenu. Me voilà surpris, bouleversé car mes écrits dans la bouche d’Adnen prennent un autre sens. j’ai les larmes au yeux et je dois continuer à jouer pendant qu’Adnen magnifique continue à égrener mes pensées de Sbeitla devant ce public si présent. Le spectacle s’achève, le public est secoué et heureux en même temps. L’émotion est là, bien présente.
Les organisateurs proposent du thé à la menthe et des pâtisseries à la sortie de la salle pendant que le public visite l’exposition ou vient échanger avec Adnen ou moi. Nous repartirons après un dernier échange avec cette merveilleuse équipe organisatrice et reprendrons cette route des montagnes de nuit. Le retour sera doux et profond, nous sommes épuisés, nous avons beaucoup donné pour ce concert et le sommeil ne sera pas long à nous rattraper à notre arrivée au gîte.
Mercredi 13 Juillet
Matin travail, je continue à écrire les notes pour le blog, doit répondre à beaucoup d’emails et me préparer car je joue ce soir pour le feu d’artifice. Je remonte mes enceintes et la carte son et me remets au travail. Nous déjeunerons avec Florian et une journaliste ensuite, Florian qui est très disponible me fait faire le tour du site.
Je rencontre des bénévoles, observe les petites mains affairées ici et là et prends la mesure de l’engagement qui se joue ici. Affirmer un local sans murs, sans peurs, ouverts, en demande d’altérité mais conscient de sa géographie et de sa sociologie. Les gens que je croise sont d’ici, ils l’affirment, ici c’est chez nous et soyez le bienvenu. Que l’on aimerait entendre et sentir cela partout!!
Ces montagnards, cernés par ces massifs impressionnants aux allures intemporelles t’accueillent, te sourient, se rendent disponibles au moindre besoin. Florian me refait l’historique du festival en compagnie de Fabien, le trésorier, les différentes phases d’évolution de l’aventure, Les bénévoles qui arrivent, ceux qui partent, la professionnalisation de l’équipe, l’association a su traverser les mutations, les crises, les changements de statuts, .. comme beaucoup d’associations que j’ai côtoyé en Bretagne. Tout reste fragile, le projet est ambitieux tant sur le festival que durant la saison hivernale. Chapeau bas! Vous n’êtes pas au bout de vos peines dans ce monde qui se replie sans cesse sur lui, mais vous êtes nécessaires. Sachez le!
La planète a besoin de vos microscopiques particules d’humanité, de poésie et d’altérité pour avancer sereinement. Loin du chaos des grands fracas politiques, guerriers liés à la possession des matières premières et leur exploitation outrancière au mépris de cette planète et de ses résidents sûrement éphémères, il existe des oasis de résistance, de réflexion, de poésie, d’altérité loin d’une naïveté bourgeoise et confortable, emplis de gens qui sentent la transpiration et qui savent pourquoi, cela me fait du bien de me poser quelques jours ici.
Après St Pierre D’Aurillac, l’énergie continue à circuler. Cet après-midi, ordres et contre-ordres autour de ma participation au feu d’artifice. finalement, on y va. Je vais m’installer avec Florian et Fabien dans une ruelle face à la montagne d’où sera tiré le feu d’artifice. Je découvre ces petites rues de Chanac très douces et très belles. Il y règne un beau calme et une belle poésie en cette période estivale. J’essaie de m’imaginer le village durent l’hiver, la vie doit y être bien différente. Tout fonctionne, nous déambulons dans les rues pour aller manger des grillades chez des bénévoles qui accueillent une garden party très sympathique.
Tout le monde se connait, on sent la force de ce temps passé ensemble à organiser le festival et des manifestations culturelles. Je retourne sur le lieu et attend le départ de la retraite au flambeaux. C’est parti! Le swing très personnel de la fanfare se fait entendre au loin, les trompettes mènent un cortège d’officiel que je n’avais pas vu depuis des années. Il y a des drapeaux tricolores, des hommes en uniformes, tout le monde marche au pas. Nous voilà bien loin de la retraite au flambeaux des Fifres que j’apprécie d’autant plus. Le rituel s’achèvera sur la place du clocher avant que je ne démarre avec mes cloches et Logelloop, puis la flûte pour 10 mn d’improvisations rythmée par les pétards lancés d’en face.
Puis rangement, chargement, déchargement et on repart boire un petit verre au bal des pompiers. Ambiance bal des pompiers, c’est incroyable, je pense que mon dernier bal des pompiers remonte à mon adolescence, ça fait tout drôle, le trio de musiciens joue bien, les gens ne dansent pas, ile public est en mode concert, très amusant. Je vais partager un verre avec Florian qui m’explique l’historique de l’association, à partir du lycée jusqu’à aujourd’hui. Il m’explique que la philosophie était de « faire plaisir aux gens » en commençant par organiser des concerts ici ou là durant 3 ans avant de démarrer ce festival. Nous allons parler longuement, de nos métiers, de nos perceptions, de nos valeurs et de nos paradoxes. Au loin Adnen fait tourner son chech et danse au milieu des bénévoles, l’image est très belle. Nous ne traînons pas, le festival s’ouvre demain et je pense que j’ai beaucoup de choses à voir.
Jeudi 14 Juillet
Promenade dans Chanac avec Adnen, nous allons faire des images devant la rue des chèvres et la rue Traversière,
il y a un stage de musique classique à Chanac et j’entends des sons de clarinettes et de flûte à bec ici ou là. Je rentre travailler au bout d’un moment après avoir échangé quelques poignées de mains et bisous avec les organisateurs croisés au détour d’un place ou d’une rue. Les sourires sont magnifiques, les gens sont au travail, impliqués, responsables et heureux. C’est très beau.
Nous prenons le déjeuner avec les organisateurs dans la salle polyvalente, je vais déjeuner avec les gens qui ont fait la ballade de samedi. Puis, retour au gîte, je dois me dépatouiller avec des soucis de Logelloop suite à la dernière résidence à Pommerit Le Vicomte, cela me prendra une bonne partie de l’après-midi sans avoir réglé mon problème. Je fais à dîner pour Adnen ce soir, au menu, un petit curry de poulet avec au préalable un petit apéritif très actif autour des idées qu’a Adnen autour de la fête des Bergers et la flûte pastorale. Nous irons ensuite assister à la projection du film « Les Messagers » . Bouleversant documentaire sur les êtres humains qui fuient leur pays avec le rêve Européen et se retrouvent bloqués à Ceuta et Melilla. Témoignages terribles de cette réalité qui n’intéresse plus personne, les « migrants » quelle expression stupide. Ce sont des réfugiés économiques, politiques, écologiques, …qui fuient des conditions de vie terrible pour tenter une autre vie souvent pour soutenir la famille restée au pays. Ils fuient des pays aux ressources naturelles exploitées par l’occident, ils fuient des pays en guerre su fait de l’intervention de l’occident. Et l’occident les traite dune façon odieuse. Je pense aux discussions avec Yacouba, avant même d’approcher de la Méditerranée, au nombre terrible de ceux qui périssent dans le désert du fait de crapules de passeurs.
Je rentre au gîte avec Adnen et nous apprenons la nouvelle du drame de Nice. La connexion internet est mauvaise et nous aurons peu d’informations hormis les sempiternelles statistiques du nombre de victimes, je préfère tenter de dormir.
Vendredi 15 Juillet
Nuit un peu agitée, Aden n’aura pas réussi à s’endormir avant 6h00 du matin, tellement il est chamboulé par le drame niçois. Je vais aller au bureau du festival discuter avec l’équipe et voir comment les choses s’organisent. Florian me dit que le festival est maintenu, belle décision, il faut continuer de se battre pour ces idéaux de poésie, de proximité, de respect, de partage et de rencontre dans ce monde en dérive.
J’accompagne Adnen qui a une interview sur la radio du festival et repart préparer mon solo.
J’ai appris tout à l’heure que je dois jouer avec Raises demain, Imed Alibi m’a fait suivre quelques morceaux, j’espère avoir le temps de les préparer demain.
Je rentre au gîte en passant par le lavoir pour voir où se joue mon solo.
Comme par hasard l’équipe qui encadre les solos est sur place. Nous évoquons le protocole avec lequel nous allons accueillir le public et je rentre relever les morceaux de Raises. Pause déjeuner et retour au travail. Mon solo est à 16h00, je suis sur place à 15h30, il y a un type qui tond sa pelouse, les balances qui démarrent sur la grande scène. Au dernier moment, je décide de m’installer dans le lavoir pour tenter de créer une bulle acoustique protégée des pollutions environnantes. J’accueille le public avec ma flûte en mode vannées où je sors les cloches du Nordeste, je les confie à deux jeunes filles et reprend la flûte, amène le public au lavoir où je présenterai flûte traversière en bois, fujara et pifano. je parle un peu de ma démarche et joue un peu. Tout se passera bien. Je repars déposer mes affaires au gîte et revient sur la place où se trouve le marché local,
fait un petit tour et rencontre Atéfock, un touareg parrain du festival, nous allons s discuter un peu, je vais flâner sur le marché, reviens voir Atéfock et serait présent pour l’inauguration officielle du festival. Les prises de parole sont sobres et justes en cette journée confuse nationalement.
Puis les concerts démarrent, je vais entendre la musique de Pura Fè et Free River, 2 belles propositions très différentes mais avec pour point commun 2 magnifiques voix et une belle présence au monde et sur scène. Les 2 concerts passent très vite. J’observe ce cadre magnifique qui m’est offert en tant que public. Les montagnes sont majestueuses et j’ai vraiment l’impression d’être dans une belle bulle artistique et écologique. Le coucher de soleil sera magnifique, le site est vraiment superbe. La voix de Pura fè est splendide même si les cadences blues/folk m’ennuient un peu au bout d’un moment. La chanteuse de Free River est magnifique, sa présence sur scène est très juste, entre puissance et fragilité, entre charisme et proximité. L’orchestre est très bien, même si à un moment, j’aimerai un peu de violence dans cet univers très sensible et très bien arrangé. Je pinaille car j’ai beaucoup aimé et le concert a passé très vite.
J’observe ce ciel magnifique aux couleurs rouges durant le coucher de soleil, les hirondelles dansent autour de la tour, le gospel vibre et le public avec.
Pause le temps du changement de plateau de Harrison Stafford, le concert démarre très fort, le public est conquis par ce curieux personnage, je ne suis pas un grand fan de reggae malgré le cours improvisé que me donne la copine de Atéfock, érudite en la matière.
J’écoute attentivement et reste pour quelques morceaux, ou effectivement, je dois reconnaître que le bougre connait son affaire et a un discours nécéssaire en ces temps rigides de repli sur soi. Mais il est tard, j’ai une grosse journée demain, il me faut aller dormir.
Samedi 16 Juillet
Matinée dédiée au travail, je dois apprendre 4 morceaux de Raises (le groupe de Imed) que je suis censé interpréter ce soir. Je retrouve Adnen qui rentre enchanté du Larzac, super. nous déjeunerons ensemble, je devais faire un interview radio, finalement; elle est annulée. Donc, je vais travailler un petit peu et préparer mes affaires pour le départ demain. Je pars de bonne heure.
Finalement, il y a des petits changements de programme. Je vais travailler un peu les morceaux dans l’après-midi me rendre sur le lieu de la balance vers 16h00.
il fait chaud, le paysage est magnifique, la scène est dos à la montagne et cet environnement somptueux amène à prendre de la hauteur. Je rencontre Virginia, la chanteuse brésilienne qui joue ce soir avec Imed Alibi, le temps qu’Imed fasse sa balance, nous discutons à bâtons rompus sur le Brésil, la nourriture, le climat, la musique,… La balance se passera bien avec un ingénieur du son l’écoute, je découvre que j’ai quelques soucis de micro HF, zut, il faudra qu’il fonctionne à mon retour en Bretagne. On a à peine le tempos de se changer et, c’est parti pour une heure de concert. Le duo se produit sans l’accordéoniste avec lequel ils avaient fait un gros travail de création. L’ensemble se tient très bien sans accordéon. Les 2 artistes amènent un univers déjà bien nourri des expériences et du savoir faire de chacun. Je suis invité en fin de concert sur 2 morceaux, j’essaie de faire sonner la flûte en bois sur ce répertoire de Bagão et Pagode que je ne maîtrise pas complètement malgré les saveurs que j’ai déjà goûté. Tout se passera bien, le public est aux anges et en redemande.
https://www.youtube.com/watch?v=WHTMddJ2R3s
Nous nous nous retrouverons ensuite avec Emma la merveilleuse chanteuse de Free River pour aller dîner avant le concert d’Esther Radha.
Dîner tranquille et belles discussions avec Virginai, Emma et Imed. Nous remontons sur le site pour le concert des Amazones d’Afrique. Je perds Imed et retrouve Adnen et Florian.
Ensuite,…. je me lâche, après cette semaine pleine de travaux, de rencontres et d’émotions, je suis en vacances, la nuit sera longue et se terminera au bar du marché avec Yves, Laurie, Adnen, Aurore, Valentin, Julia, Antoine, et quelques bénévoles. J’avoue ne plus me rappeler de la fin de soirée.
Dimanche 17 Juillet
Réveil avec une petite gueule de bois, la douche fera beaucoup beaucoup de bien. Adnen est très heureux de sa soirée et me résume la fin qui s’est très bien terminée. Nous allons faire le chargement de ma voiture avec Adnen, Flutorama occupe beaucoup de place finalement.Nous quittons le camping, Adnen souhaite faire une dernière photo avec la Fujara, hommage aux Flûtistes pastoraux et bergers du monde. Nous avons rendez-vous avec tout le monde place de la mairie pour le dernier au revoir. C’est dur de partir de Chanac après ce concentré de vie, de partage, d’amour, de doutes, de rires, de valeurs, de questionnements. Nous prenons un dernier verre ensemble faisons une photo de famille finale; les dernières accolades et bisous et je dois partir. Je m’en vais vers le Limousin et la route sera longue., 4h30 à conduire, je regarde une dernière fois ces paysages de montages magnifiques et laisse aller mes pensées autour de tout ce que j’ai reçu à Chanac. « faire plaisir au gens », être dans le partage, j’écoute France Culture et la philosophie radiophonique me ramène à Chanac; » Ne pas dire pour faire mais faire pour dire! ». Voilà un beau résumé de cette semaine magnifique., certes, la vie est plus complexe que cette bulle dans laquelle j’étais, la présence permanente d’Adnen ma rappelait la dureté et la beauté de la vie. Quelle chance j’ai eu de faire ce voyage à ses côtés. il va falloir digérer tout cela, les rencontres, les expériences, les envies, l’avenir. Qu’en ferons-nous dans ce monde qui bascule vers l’obscurité? Gardons la force, le courage, les convictions, les rêves, les envies pour continuer à propager et à incarner nos valeurs si fragiles soient elles.
Merci à Murielle Cadiou pour les photos.